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Coca-Cola : un Père Noël rouge de honte?

Coca-Cola et le Noël Papa… « Oh non, pas encore cette histoire! On nous l’a raconté des dizaines (voire plus) de fois! ». Je vous entends d’ores et déjà arriver sur vos grands chevaux, vous, adeptes de la sacro-sainte nouveauté de la nébuleuse bloguesque. Eh bien si, il faut quand même passer par les fondamentaux historiques pour maîtriser le présent, même en matière de soda. Et puis vous verrez, vous allez apprendre plein de choses intéressantes dans cet article! Enfin, pour l’assistance la plus réticente, je lui rétorque que nous sommes en période de Noël et quoi de mieux que la fameuse légende urbaine qui lie le fameux cola rouge et le bonhomme qui a remplacé Jésus depuis belle lurette dans nos coeurs d’enfants accros au glucose. Et toc!

On va pas y aller avec le dos de la cuillère et on va révéler le pot aux rose : le Père Noël n’est pas une invention du diabolique soda rouge et ses lutins ne se trouvent pas à Atlanta. « Oh mon Dieu! On m’aurait menti! J’en étais pourtant sûr, ces salauds de libéraux de chez C***! ». Blablabla… Ben non, le Père Noël dans sa forme « moderne » existait bien avant, pour tout vous avouer. Depuis le XIXe siècle pour être plus exact. A l’époque où la populasse amerloque, toujours ancrée dans son passé d’immigrante, le confondait encore avec le patriarche Saint-Nicolas, le pasteur Clément Clark Moore décrivait les bases du désormais Papa traditio-Noël dans son conte « The Night Before Christmas ». Et en 1821, Sinterklaas (Saint-Nicolas en néerlandais) s’américanisait en Santa Claus et adoptait le total look : longue barbe, joues rouges et ventripotent. Le Père Noël sera gros donc sympa. Quant à sa couleur rouge, présumée oeuvre du Diable fait soda, les avis divergent. Certains affirmeront qu’il ne s’agit là que d’une reprise du costume de Saint-Nicolas, pour d’autres tout porte à croire qu’elle est l’oeuvre de l’illustrateur Thomas Nast (aucun lien avec un quelconque et mauvais groupe de musique, je crois). En 1863, ce dernier représente dans la revue Harper’s Illustrated weekly le bonhomme ventru vêtu d’une veste et d’un pantalon rouge, tenus par un large ceinturon. Toujours pas d’apparition de C***-C***, donc.

Mieux, le soda rouge ne sera pas le premier à user de l’icône païenne de la nativité sur son propre terrain, la publicité. La marque de cigarette américaine Murad utilisait dès 1919 l’image d’un Père Noël junkie du porte-cigarette façon Loulou de Pabst (moins sexy que Louise Brooks, quand même!), aux antipodes du sempiternel fumer tue. Pis, le texte de la réclame assurait que lorsque Santa Claus demandait aux enfants ce qu’ils souhaitaient pour Noël, ces derniers choisissaient tous un bon paquet de mougeasses qui fait tousser. Prends ça, Ministre de la Santé! Quelques années plus tard, le soda rouge se voit même supplanté par un autre soda puisqu’en 1923 la Ginger Ale White Rock Beverages croque un Papa Noël bedonnant et rougeaud qui se frotte la panse en même temps qu’il se délecte des lettres d’enfant, une bouteille de bourbon sur la table. Prends ça, Charles Bukowski!

Tu aimes les enfants? Un peu trop? Et tu ne peux plus cacher ce secret? Deviens Père Noël avec C***-C***!

Et là, vous vous dites, C*** sont des grosses baltringues qui n’ont fait que pomper un concept qui ne doit son succès qu’à un matraquage à grande échelle. Oui mais non. On est à l’hiver 1931, la Grande Dépression pointe le bout de son nez avec un peu d’épaules, histoire de mettre la tête bien dedans. Le Diable rouge est dans les choux. A l’époque où Santa Claus n’avait pas de Barbie à distribuer, les pontes d’Atlanta se frottaient les mains devant les fours en dealant avec les nazis en Reichie (mais chuuut!). Problème, ça consomme plus sous la bannière étiolée… pardon, étoilée. Notamment en cette période d’hiver. C’est à ce moment-là qu’intervient un nouvel illustrateur, Haddon Sundblom. S’inspirant du conte de Moore, ce dernier représente le Père Noël une bouteille de C***-C*** à la main, histoire de reprendre des forces avant de repartir pour sa tournée mondiale de trains en bois et d’oranges dans les socks. Derrière ça, et pendant une trentaine d’années, la soda rouge bombarde les espaces publicitaires de Papas Noël tous aussi sympas les uns que les autres parce qu’ils consomment grave (mais trop quoi!) de C***. Haddon Sundblom, quant à lui, finira dans les calendars de pin-ups. Awesome. L’assurance d’une vie bien remplie.

Mais une question me brûle les lèvres : pourquoi donc tout le monde s’est acharné sur le Diable fait soda? Loin de moi l’idée de le défendre mais bon, étrange réaction que celle-ci. Après une tentative d’explication scientifique avec un spécialiste des légendes urbaines avortée, j’ai décidé de me lancer. A mon humble avis, une telle histoire a été créée de toutes pièces afin de voir un géant du consumérisme démoli par la conscience populaire. C$$$-C$$$ génère trop de fric et ça gène dans l’éthique. Accusons-les donc de jouer avec une icône populaire et mondialement connue synonyme de rêve et de féerie, concept dégueulasse, vous en convenez. Enfin bon, quand il s’agit de pasticher Rita Hayworth en Gilda ou d’utiliser des pipoles chanteurs, personne moufte. Oui, mais on s’attaque à l’imaginaire, là! Faut faire quelque chose… Et Nathan Grills, alors, on l’emmerde pas? Selon lui, le Père est un mauvais exemple parce qu’il cherche pas à perdre son ventre et cultive son embonpoint en faisant du traîneau, l’bâtard. Responsable de l’obésité chez l’enfant, donc. Mouais. Mon conseil, continue à boire du soda p’tit Père Noël, ça vaudra mieux. Et surtout du Coca-Cola (oups, j’ai lâché le mot). Parce que bon, Santa Claus en bleu Pepsi, sincèrement, ça l’aurait pas fait…

Matthieu Rostac

Crédit photo : ZPR Services

Royal Soda : un règne sans partage sur les DOM TOM. Et la Métropole, dans tout ça?


Pour plus de véracité, cet article aurait dû se nommer « SNEMBG : un règne sans partage sur les DOM TOM ». Mais si j’avais fait cela, le bon jeu de mot/punchline facile qui t’accroche l’oeil ne serait plus et mon article aurait fait fuir le peu d’internautes dont je peux me targuer. Passons. Enfin, pas tout à fait. Qu’est-ce qui se cache derrière ce sigle SNEMBG et surtout, quel est son lien avec le soda Royal Soda? Très simple, la Société Nouvelle des Etablissements Modernes de Boissons Gazeuses, franchise C***-C*** et Orangina martiniquaise qui possède et commercialise peu ou prou tout ce qui contient des bulles aux Antilles, n’est autre que la fière génitrice du Royal Soda, fils à bulles gazéi-parfait. Pour ceux qui veulent en savoir plus sur la pieuvre sodaïco-créole et qui aime la grosse pommade passée grossièrement, c’est ici.

Un fils parfait, en effet, tant sa polyvalence donne du fil à retordre aux autres boissons gazeuses du marché. Enfin, lorsqu’elles ne font pas partie de la même grande famille SNEMBG (L’Ordinaire, Kili-Bibi, etc). Les multiples arômes du Royal Soda, pas toujours convaincants au demeurant, lui donnent le statut de gamme la plus élargie des linéaires antillais. Sinobol (glace pilée proche du Granini), Ananas, Anis, Orgeat ou encore Grenadine. Le meilleur, paraît-il. Car pour ma part, j’ai testé les arômes Banane et Kampane. Et mon palais s’en rappelle encore…

N’ayant toujours pas réussi à élucider le mystère du kampane, je vous livrerai mes impressions telles quelles. Le Royal Soda Kampane dégage, de prime abord, une odeur assez forte qui laisse vite la place à un goût outrancier et caramélisé. Un retour « poivré » et une légère pâteuse achève cette première gorgée laborieuse pour ma petite becquée d’européen. La saveur qui emplit la bouche et les narines m’avait alors rappelé les effluves si caractéristiques des boutiques africaines de Château-Rouge (tresses, dombolo et sapologie inside). La couleur, elle, est d’un marron quelque peu translucide. Le kampane, c’est marron, alors? C’est un fruit? Une racine? S’il vous plaît, répondez-moi! Je vous implore, dites-moi ce qu’est le kampane! Je n’en dors plus la nuit… A l’inverse, pour la banane et son goût, je connais sa couleur. Constat : on doit pas avoir les mêmes bananes de l’autre côté de l’Atlantique. La boisson est d’un orange vif voire effrayant. Sunglasses at night de rigueur. Le goût, lui, est très chimique : extrêment sirupeux, le Royal Soda évoque vaguement une saveur de banane qui peut rapidement écoeurer. A boire vite donc, d’autant que la boisson s’aplatit rapidement. Et pourtant, certains aiment… Je vous le donne en mille, en Europe, nous ne sommes pas encore habitués à ces saveurs démesurées. Sinon, comment expliquer la rareté du Royal Soda dans l’Hexagone?

Pénurie de Royal Soda à Barcelone. Eric Abidal est contraint de boire un Starbuck's. "Ou ka manké mwen" aurait-il déclaré, peiné.

Nombreux sont les adeptes en Métropole de ce monarque qu’on prendrait facilement pour l’Arlésienne des sodas. Nombreux sont également ceux qui déclarent sur les forums arpenter les épiceries asiatiques à sa recherche désespérée. Certains en viennent même à l’utiliser comme blaze pour leur skyblog. Trop LOL, quoi. Sans compter la foultitude de groupes Facebook érigés en l’honneur du roi des Antilles gazéifiées. Le groupe « Je Bois « ROYAL SODA & CARESSE ANTILLAISE » parce qu’il n’ y a que ça de vrai » se permet même le luxe de s’offrir près de 2000 membres. Belle communauté d’esthètes! Dans tous les cas, dès 1984, on avait la preuve tangible que le Royal Soda était le must en matière de soda « coolissimo ». Soit la même décennie que la lambada et le zouk. Coeur Caraïbes les 80’s, y a pas à tortiller. A ce titre, et ce sera ma désormais mauvaise et habituelle chute, je parapherais le deuxième chantre de la négritude, après Aimé Césaire, j’ai nommé Lilian Thuram, qui disait à peu près cela : « A tous ceux qui se battent pour savoir qui sont les meilleurs des Beatles ou des Rolling Stones, je me dis que ces gens-là n’ont jamais écouté Kassav! »(*). Eh bien, à tous les gens qui se battent pour savoir lequel est meilleur entre le Diable fait soda et Pepsi, je leur dit qu’il n’ont jamais goûté le Royal Soda. Mouhaha.

Indications techniques : Certes, le Royal soda est rare mais vous le trouverez sans aucun doute Au 14 Marché, 14 rue Marx Dormoy (Métro Marx Dormoy ou La Chapelle). La dernière fois que j’y suis passé, tous les goûts s’y trouvaient à l’exception de l’orgeat et la bouteille de 50cl coûtait 1,39€ si mes souvenirs sont bons. Va falloir qu’ils me paient les pakistanais du 14 pour toute cette pub latente!

Matthieu Rostac

Crédit photo : Aurore Colibert et Pure People

(*) Propos recueillis par l’excellent So Foot, si mes souvenirs sont bons.

Selecto : le Coca du pauvre n’en est pas un!

Avant de lancer Jaimelesoda.com, je me suis longtemps creusé la tête (si si, je vous assure!) afin de déterminer quel soda inaugurerait le mieux ce blog en fanfare. Il fallait un soda original, décalé, étranger mais qui puisse parler à (à peu près) tout le monde. C’est alors que le Selecto est venu jusqu’à moi (c’est une image, bien sûr)… Bon sang, mais c’est bien sûr! Le Selecto!!!

Même si la nébuleuse sodaïque te paraît complètement abstraite, tu as déjà été touché(e) par cette obscure boisson gazeuse qu’est le Selecto, toi, jeune et curieux internaute. Oui, car n’importe quelle personne normalement constituée, née dans les années 80(*) a déjà eu un contact, de près ou de loin, avec le roi des sodas algériens. Peut-être ne t’en rappelles-tu pas… C’était en 1999. La France est jeune championne du monde de foot, Paco Rabanne veut faire péter la planète avec l’aide des Soviets et le 113 sort son premier album, Les Princes de la Ville. Au sein duquel figure l’inénarrable tube générationnel Tonton du Bled. Léléla!

Souvenez-vous cette superbe punchline qui ouvre le pont musical du tube made in Vitry-sur-Seine(**) : « J’suis à la plage à Boulémat avec mon zinc et mon derbouka/Dans la main un verre de Selecto imitation Coca/Une couche de Zit-Zitoun sur le corps et sur les bras /Avec mon pote sur un fond de Zahouania ».

Mais il y était vraiment à Boulemat avec son zinc'?!

Eh oui, sans le vouloir, le 113 a tendu l’oreille de deux nombreuses personnes vers cette mystérieuse « chose » qu’est le Selecto imitation Coca. Alors, remettons les pendules à l’heure. Exactement, le Selecto n’est pas un ersatz de la diabolique boisson rouge comme on en trouve une foultitude dans les GMS. Le Selecto est une boisson gazeuse pionnière : elle voit le jour au début du XXe siècle, peu après les grands sodas américains, des mains talentueuses du « sourcier » algérien Youssef Hamoud, limonadier de son état. Un temps nommée Victoria, la boisson deviendra définitivement le Selecto, pour mieux illustrer la sélection minutieuse des ingrédients utilisés pour la concoction du breuvage. Ca, c’était pour la petite histoire. Maintenant, on va taper dans le bois dur, esthètes du soda.

Clairement, le Selecto n’a rien à voir avec le Diable fait soda C***-C***, la seule similitude résidant dans le secret de la recette et un vague rouge comme couleur d’appui. Non, le Selecto, c’est un habile mélange d’essence de pomme et un dosage glucidique de diabétique qui lui donnent une saveur surannée de joli bonbon. Un Arlequin de Lutti de 1,5l, pour synthétiser. Avec un petit plus indescriptible qui vous reste dans la bouche plusieurs minutes, une pâteuse agréable qui en fait selon moi la Rolls Royce des sodas du Maghreb. Le Selecto est donc un soda assez facile à terminer, si tant est que l’on est pas écoeuré par les effluves de saccharose. D’autant que la boisson garde ses bulles assez longtemps. Et puis bon, le packaging rouge/bleu saturé et sa police datée lui donnent un petit côté rétro-local. Pop the Casbah! Dis-moi, papy, c’était comment l’Algérie en 62? T’en mettais, toi, du Zit-Zitoun?

Indications techniques : Si vous comptez trouver du Selecto, je n’ai pas d’endroit en particulier à vous conseiller. On en trouve en GMS ( notamment au Supercasino, 125 Boulevard Vincent Auriol PARIS 13, métro Nationale) ou pour les puristes, dans les épiceries et autres alimentations générales des tréfonds du 18e arrondissement telles que le 14 Marché, 14 rue Marx Dormoy (Métro Marx Dormoy ou La Chapelle). Les prix oscillent entre 1 et 1,60€. Pas cher donc, pour une Rolls Royce.

Matthieu Rostac

Crédit photo : Aurore Colibert et un obscur Skyblog


* Pour ceux qui sont nés avant les années 80, logiquement, vous n’êtes plus en âge de consommer du soda. Vous êtes établis, une belle maison (à crédit), des enfants (à crédit aussi) et donc, point d’épicerie qui n’a de fine que le nom pour vous nettoyer l’estomac après un samedi soir mouvementé. A l’inverse, si tu es né après les années 80, ahah, va m’acheter de suite cet album collector du 113, monument de la dévolue culture Skyrock nineties.

** Paroles trouvées sur le collégial et élégant site de paroles Rap2France.com.